Ousmane Sow, premier Noir à l’Académie des Beaux-arts, dédie son installation à l’Afrique et à Mandela

Trente ans après l’élection de Léopold Sédar Senghor à l’Académie française, le sculpteur sénégalais Ousmane Sow a été mercredi le premier Africain à rejoindre l’Académie française des Beaux-arts, dédiant son installation solennelle « à l’Afrique tout entière, à sa diaspora, et aussi au grand homme Nelson Mandela ».

Avant la cérémonie d’installation, la haute assemblée culturelle et artistique de l’Institut de France a observé une minute de silence à la mémoire de l’ancien président de l’Afrique du Sud.

En tant que membre associé étranger, Ousmane Sow, 78 ans, a été élu à l’unanimité et occupera le fauteuil qui était jusque-là celui du peintre américain Andrew Wyeth. En 1999, l’oeuvre d’Ousmane Sow, célèbre pour ses sculptures sur armatures de métal avec de la terre macérée de sa composition, a fait l’objet d’une grande rétrospective sur le Pont des Arts à Paris.

« Mon élection a d’autant plus de valeur à mes yeux que vous avez toujours eu la sagesse de ne pas instaurer de quota racial, ethnique ou religieux pour être admis parmi vous », a dit le nouvel académicien dans son discours de remerciement.

Pour le sculpteur Jean Cardot, Ousmane Sow apporte à l’Académie des Beaux-Arts « (son) intelligence et (son) génie africain ». « Vous êtes l’exemple même de la richesse et de la merveilleuse diversité de l’expression artistique », a dit encore M. Cardot, au nom de l’Académie des Beaux-arts.

L’épée a été remise au nouvel académicien par Abdou Diouf, secrétaire général de l’Organisation Internationale de la Francophonie et ancien président du Sénégal. Conçue par Ousmane Sow, elle représente un Africain Nouba en train d’effectuer un saut, évoquant son propre « saut dans l’inconnu » quand, à l’âge de cinquante ans, il a abandonné son métier de kinésithérapeute en banlieue parisienne pour sa passion de toujours, la sculpture.

Son habit d’académicien a été créé et offert par le couturier Azzedine Alaïa qui a assisté à l’installation. Abdou Aziz Mbaye, ministre de la culture du Sénégal, était également présent.

L’Académie des Beaux-arts, ainsi dénommée depuis 1803, est l’une des cinq académies qui forment l’Institut de France par ailleurs constitué de l’Académie française, l’Académie des Sciences, l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres et l’Académie des Sciences morales et politiques.

Source : Le Point

 Ousmane Sow passe le pont des Arts, l’épée à la main

Le sculpteur Ousmane Sow, 78 ans, va entrer à l’ Académie des Beax-Arts à Paris, en tant que membre associé étranger, le premier Africain à entrer  sous cette coupole-là. Ce mercredi 11 décembre, à 15 heures, l’artiste sénégalais sera installé par Jean Cardot, dans un fauteuil précédemment occupé par le peintre américain Andrew Wyeth (1906-2001), alors que le monde célèbre la mémoire de Neslon Mandela, que Sow a statufié.

« Mandela occupera une place extraordinaire dans l’histoire de l’humanité, comme Gandhi ou Jésus : il est arrivé à réconcilier un peuple ; je ne dis pas qu’il n’y a plus de racisme en Afrique du Sud mais il en a fait une société apaisée », explique Ousmane Sow dont la statue du dirigeant sud-africain, sculptée en 2009, se trouve au siège de la Compagnie française d’Afrique occidentale à Sèvres (Hauts-de-Seine).

L’entrée d’Ousmane Sow à l’Académie des beaux-arts va réunir une foule plus bigarrée qu’à l’ordinaire, des chanteurs Jane Birkin ou Youssou N’Dour à l’écrivain Jean Christophe Rufin jusqu’au couturier d’origine tunisienne Azzedine Alaïa, qui lui a offert son habit de cérémonie. C’est l’ancien président du Sénégal Abdou Diouf, secrétaire général de l’Organisation internationale de la Francophonie, qui remettra l’épée au nouvel académicien. Ousmane Sow en a dessiné lui-même le pommeau, avec un homme Nouba en plein vol plané. « Je l’appelle le saut dans l’inconnu », explique le géant à la barbiche blanche, « car je ne regrette pas de m’être lancé dans l’art à 50 ans passés », avec de premières grandes sculptures représentant des lutteurs Nouba du Sud-Sodan, inspirées par le travail photographique de la cinéaste Leni Riefensthal.

Né à Dakar en 1935, Ousmane Sow débarque à Paris à l’âge de 22 ans, où il vit de petits boulots avant d’entrer à l’école de kinésithérapie de Boris Dolto, un personnage qui le marquera fortement. A l’indépendance du Sénégal, en 1960, il opte pour la nationalité de son pays natal où il s’installe. Après plusieurs décennies à soigner les corps, il choisit de les modeler  dans une mixture dont il a le secret, à base de sable, de paille et de jute, soit une vingtaine de produits longuement macérés ensemble. La carrière d’Ousmane Sow a pris un tour décisif à partir de 1999 quand, en face de ce même Institut de France, il expose ses sculptures sur le pont des Arts, au-dessus de la Seine.

3 MILLIONS D’ADMIRATEURS POUR « LE GRIOT DE LA GLAISE »

Trois millions de personnes ont admiré ses œuvres gigantesques, grandiloquentes et sensuelles, pétries de terre africaine. Les critiques d’art contemporain avaient beau s’étonner de cet engouement pour une œuvre figurative, décrier le « tapage » médiatique, les curieux ont continué d’affler sur le pont, au point que certains se sont inquiétés de sa solidité. « Le pont des Arts est un événement qui est resté dans les mémoires, dans tous les pays : les gens m’en parlent comme si c’était hier, en se trompant de dates ou de pont de Paris, mais ils ont encore les yeux qui brillent », se félicite Ousmane Sow, surnommé « le griot de la glaise » par l’écrivain John Marcus.

Ethnies d’Afrique puis Indiens d’Amérique représentant, en 1999, « la bataille de Little Big Horn », éclatante victoire sur le général Custer : Ousmane Sow fait l’apogée des fragiles contre les puissants, de David contre Goliath. « Ceux qui se soumettent sans rien tenter ne m’intéressent pas : j’aimesouligner que les petits ont une chance contre l’asservissement », confirme-t-il. Après ces grandes séries, l’artiste a représenté des personnalités qu’il estime, de celles qui empêchent « de désespérer du genre humain ».

TRENTE ANS APRÈS LÉOPOLD SENGHOR

Dans la série intitulée « Merci », on trouve pêle-mêle : son propre père (un poilu de 14-18), Victor Hugo, le Général de Gaulle, Martin Luther King, Nelson Mandela… Il doit prochainement livrer une statue de Toussaint Louverture – libérateur de Haïti mort dans une prison française – commandée par la ville de La Rochelle, qui a décidé d’assmer son passé négrier.

Trente ans après un autre Sénégalais, Léopold Senghor reçu le 2 juin 1983 à l’Académie française, Ousmane Sow considère comme « un véritable honneur que de représenter aujourd’hui le peuple noir au sein de l’Institut ».

  • Véronique Lorelle

Source : Le Monde

Site : Ousmane Sow

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