Rapport de l’atelier sur : « L’intégration des éléments patrimoniaux dans les programmes d’enseignement en Afrique (niveaux primaire et secondaire) »

Yaoundé (Cameroun), 21 au 25 février 2011.   Par Kodjo Cyriaque NOUSSOUGLO

 

Yaoundé Une vue de l'assistance
Yaoundé Une vue de l’assistance

Du 21 au 25 février 2011, avec l’appui du Bureau régional de l’Afrique de l’Ouest de l’OIF, de la FICDC et du Ministère togolais des Arts et de la Culture, M. Kodjo Cyriaque NOUSSOUGLO, président de la Coalition Togolaise pour la Diversité Culturelle, a participé à Yaoundé au Cameroun, à un séminaire-atelier sur l’intégration des éléments du patrimoine culturel dans les programmes d’enseignement en Afrique organisé par l’Ecole du Patrimoine Africain (EPA) en partenariat avec le Ministère camerounais des Enseignements Secondaires. Ce séminaire entre dans le cadre du projet : les « Musées au service du Développement » (MSD). Il a réuni, des Inspecteurs de l’enseignement primaire et secondaire et des professionnels du patrimoine culturel du Bénin, du Cameroun, du Gabon, du Mali  et du Togo.

Quand on sait l’importance de la culture dans la formation de l’individu et en mesurant la gravité de la perte des repères culturels en Afrique, on comprend l’impérieuse nécessité d’introduire des éléments du patrimoine culturel dans l’enseignement en Afrique. C’est pourquoi, au cours de la cérémonie d’ouverture, Dr. Evelyne Mpoundi Ngolle, Coordinatrice de l’Equipe Camerounaise, a souligné que : « La problématique de l’insertion des éléments patrimoniaux dans les systèmes éducatifs de nombreux pays africains reste une préoccupation majeure. Les programmes d’enseignement sont restés encore tributaires de leur histoire coloniale, la plupart de ces pays n’ayant pas encore résolu les problèmes des choix socioculturels. »

Le séminaire-atelier du Cameroun se comprend comme l’une des « initiatives engagées dans le sens de remédier à cette situation ». L’enjeu c’est que, la plupart des pays africains arrivent effectivement à prendre des lois et à rénover leurs programmes d’enseignement afin qu’ils répondent  au  processus de reconquête de l’identité culturelle avec l’option d’ouverture sur le monde. Car, aujourd’hui, les dirigeants politiques et les acteurs de la société civile doivent tout faire pour que les jeunes africains, tout en étant citoyens à part entière de leur pays, soient également citoyens du monde,  appelés à prendre leurs responsabilités au sein de leur société « dans le respect des valeurs communes et des particularités culturelles ». L’insertion des éléments du patrimoine dans les programmes scolaires participe donc de la valorisation culturelle et de la promotion de la diversité culturelle dans les pays d’Afrique.

Il est intéressant de souligner que le Cameroun a pris la tête de proue de cette salutaire initiative. Sur le plan juridique, sa constitution de 1996 souligne que le peuple camerounais doit être « fier de sa diversité linguistique et culturelle …. élément de sa personnalité nationale » qu’il faut contribuer à enrichir. Le rôle de l’éducation, ainsi que le souligne la loi d’orientation de l’Education du 14 avril 1998, est d’œuvrer à « la protection et la promotion  des langues nationales » en formant « des citoyens enracinés dans leur culture, mais ouverts au monde et respectueux de l’intérêt général et du bien commun ». La loi dispose également que l’éducation  « a pour mission générale la formation de l’enfant en vue de son épanouissement intellectuel, physique, civique et moral et de son insertion harmonieuse dans la société, en prenant en compte les facteurs économiques, socio-culturels,  politiques et moraux. »

 Dans cette loi, les rôles dévolus à l’Etat dans la mise en œuvre de la politique et du financement de l’éducation au patrimoine culturel et linguistique sont clairement définis. Entre autres, il « veille à l’adaptation permanente du système éducatif aux réalités socio-culturelles nationales ainsi qu’à l’environnement international, particulièrement en ce qui concerne la promotion des enseignements scientifiques et technologiques, du bilinguisme et l’enseignement des langues nationales. »

Ces dispositions particulières du Cameroun vont dans le sens du rôle assigné à tous les pays africains dans le cadre de la formation des citoyens et de la revalorisation du patrimoine culturel.

Comment enseigner le patrimoine culturel à l’école ?

Cyriaque Kodjo Noussouglo
Cyriaque Kodjo Noussouglo

Dans une communication intitulée : « Diversité culturelle en classe de français : éléments de pédagogisation », Mme Christine Onguene de l’Université de Yaoundé, en partant de la problématique du « pourquoi va-t-on à l’école ? » a souligné qu’aller à l’école permet d’apprendre, de comprendre et d’apprendre à penser. S’il en est ainsi, et étant donné que l’école favorise la rencontre du patrimoine avec l’enfant selon une philosophie particulière, il importe que le patrimoine entre solennellement mais sans bruit en classe. La contribution du Français serait donc de recourir à une pédagogie de la séduction, de la fascination, de l’attraction pour faire entrer efficacement la culture à l’école. L’intervenante a saisi cette opportunité pour demander que s’instaure un partenariat entre l’école et l’Université pour tonifier la documentation, construire des documents attractifs, des didacticiels sur les éléments culturels qui serviront de supports à de nombreuses activités de classe.

Les actions à réaliser par chaque délégation

Ce séminaire-atelier fait suite à celui tenu en juillet 2010 à Porto Novo au Bénin  dont les objectifs étaient : 1) d’informer les responsables en charge du développement curriculaire en Afrique des acquis du MSD (Musées au service du développement), programme piloté par l’EPA de Porto Novo ; 2) de stimuler le développement curriculaire en vue de restaurer le patrimoine culturel africain à travers la création d’un cadre opportun de réflexions et d’échanges sur la problématique de la relation musée – école ; 3) de créer un Réseau des Instituts Pédagogiques Nationaux et autres structures en charge du développement curriculaire dans le but d’intégrer le patrimoine culturel africain dans les curricula et concevoir le plan d’animation dudit réseau ; 4) d’élaborer un plan d’action définissant les voies et moyens pouvant permettre la production et  la diffusion des ouvrages et des fiches pédagogiques devant servir de supports à l’éducation au patrimoine dans les écoles africaines ; 5) de mettre en place un mécanisme de suivi/é/évaluation de l’ensemble des activités pédagogiques valorisant le patrimoine culturel en Afrique.

Les actions à réaliser par chaque délégation avant le 31 décembre 2011 étaient de : faire un compte-rendu de la rencontre aux autorités ministérielles ; mettre en place une équipe nationale multidisciplinaire et plurisectorielle ; partager les résultats du séminaire avec les membres de l’équipe plurisectorielle ; analyser et adapter le plan d’action quinquennal ; informer l’EPA et les pays membres du réseau des réalisations nationales ; démarrer progressivement les activités  du plan d’action quinquennal.

Un ciblage disciplinaire a permis de dégager que le patrimoine culturel peut être enseigné dans les cours suivants : le français, l’anglais, l’histoire, la géographie, l’éducation civique et morale, les mathématiques, les sciences de la vie et de la terre, les arts, les langues et les cultures nationales. Cet enseignement est également possible dans le primaire. D’ailleurs, au cours de l’atelier, une visite d’une classe de cours moyen à l’école primaire publique de Nkolndongo a permis aux délégués d’assister à une leçon sur les danses traditionnelles et sur la culture nationale dans une école primaire, occasion de se rendre compte que les jeunes africains, surtout citadins sont progressivement coupés de leurs propres cultures.

Les travaux du séminaire ont consisté en des communications, des visites sur le terrain, des travaux en ateliers. Ils ont été ouverts et clôturés par le Secrétaire d’Etat aux Enseignements Secondaires du Cameroun, M. Mounouna Foutsou, représentant personnel du Ministre des Enseignements Secondaires. L’Ecole du Patrimoine Africain de Porto-Novo (Bénin), initiatrice de la rencontre, était représentée par M. Edouard Koutinhouin Sedehou assisté de Diane Toffoun.

Je tiens à adresser mes vifs remerciements à Charles Vallerand ainsi qu’à Carmen Moral-Suárez du Bureau de la FICDC  de Québec pour leur précieuse contribution à ce déplacement sur Yaoundé.

Fait à Lomé, le 22 mars 2011.

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.