Vou gan ou Atopani, cohésion entre le monde des ancêtres et des vivants

« Vou gan » ou « atahounga » ou « Acrobou » (en milieu éwé), encore appelé « atopani » (en milieu guin) désigne une danse exécutée en milieu Ewé pendant les cérémonies funèbres d’un notable ou d’un chef. Littéralement selon les différents dialectes, « vou gan » ou « atahounga », « atopani », fait référence à dieu et au tambour, surtout au « grand tambour » pour exprimer l’importance et la grandeur de cet instrument. Vou gan met en jeu trois tambours, dont un plus grand et impressionnant par la taille et le son plus grave dégagé, et deux plus petits. Il s’agit d’une représentation trinitaire : le grand tambour désigne le père ; les deux plus petits font référence à deux jumeaux, dont un mâle et une femelle.

Cette représentation trinitaire et gémellaire revêt un caractère religieux et sociologique, les figures paternalistes du père et du divin. Le « vou gan » joue aussi le rôle de communication et est appelé « tam-tam parlant ». En ce sens, il est joué pendant un événement important pour le village, pour inviter les habitants du village, généralement des agriculteurs partis au champ, à regagner les pénates. Il peut être joué lors de grandes cérémonies officielles d’accueil des autorités publiques.

Atopani ou Acrobou ou Atavougan le tam-tam parlant Photo: Gaëtan Noussouglo
Atopani ou Acrobou ou Atavougan le tam-tam parlant Photo: Gaëtan Noussouglo

Il s’agit d’une danse qui adopte une forme de théâtralité où la mise en scène et le spectacle a toute son importance, puisqu’il s’agit en réalité d’une cérémonie funéraire. Dans le milieu traditionnel Ewé, pour jouer « Vou Ga », on procède à une cérémonie d’installation des joueurs, des danseurs, et des notables. Les tam-tams sont généralement disposés sur le sol. Dans certains milieux Ewé ou Guins, le « vou gan » est porté par des personnes et les joueurs jouent en marchant.

Durant l’installation, le joueur principal, celui du « vou gan », joue. Il salue ainsi l’arrivée des notables et des joueurs dans un langage codé compris des seuls initiés. Quand le « vou gan » nomme le notable, ce dernier décline son nom et lui répond. C’est un grand jeu de rôle où le dialogue entre le vou gan et la personne nommée a toute son importance et son audience. Le nom, aujourd’hui patronyme, en milieu Ewé revêt plusieurs significations et dans l’imaginaire exprime l’essence même de la personne qu’il désigne.

Généralement, le chef du village est la dernière personne à venir s’installer, et son arrivée est saluée par le « vou gan« .

Le joueur du « vou gan » est un initié, coopté par les notables du clan ou du quartier dans une famille spécifique. Il est joueur à vie et n’est remplacé qu’à son décès.

La danse du « Vou Gan » est une danse de notable. Et traditionnellement en milieu Ewé, dans les villages, chaque clan ou tribu a son danseur, désigné à vie. Le danseur est généralement habillé d’un pagne traditionnel kenté et coiffé d’une couronne, expression de son rang social et de la notabilité.

Asafo Hine de Yometchin au milieu Photo: Gaëtan Noussouglo
Asafo Hine de Yometchin au milieu Photo: Gaëtan Noussouglo

Quand le danseur est convoqué à danser. Il quitte son siège et fait la ronde pour saluer toutes les tribus, signe de révérence et d’allégeance également au chef. Au-delà du chef, c’est aussi un signe d’humilité par rapport à toute l’assemblée. Car si le danseur n’est pas humble et demande la permission à toute l’assemblée, il pourra être tenté par des individus mal intentionnés et n’ira pas jusqu’au bout de son rituel. Ces gestes expriment aussi le lien entre les vivants et les morts. Il revient ensuite sur ses pas et commence un rituel dansant au rythme progressif (crescendo) allant de lent à fort (adagio à andante) et énergique : frénésie des pieds et des mains mettant en harmonie tout le corps. La danse constitue l’expression d’une verticalité, le point de départ étant le siège du rituel. Le notable, généralement suivi de deux femmes qui lui jettent des lauriers, évolue progressivement vers les joueurs où il termine la danse par une libation sous l’ovation du public.

Le rituel dansé a l’allure d’une pantomime et revêt un sens profond. Il affirme la force du divin et la communion entre les vivants et les morts (ancêtres). «Il n’y a qu’un dieu et un seul. Tous les clans doivent s’unir autour des rites ancestraux. Je suis là en tant que messager, solide comme un roc malgré mon âge et je vous balise le chemin. Je transmettrai vos messages d’amour, de vie et de cohésions à tous vos descendants avant de me coucher parmi vous. » Tels sont les mots véhiculés par l’Asafo Hiné de Yométchin, un village situé à 15 km de Kévé.

Il y a lieu de remarquer l’humilité qui est le trait caractéristique de ces rituels. Avant d’exécuter la danse, on s’incline devant toute l’assemblée réunit, quel que soit l’âge des personnes présentes.

Tony Féda et Gaëtan Noussouglo © Togocultures

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