Né au Togo, Joe Kiki semble avoir la musique dans le sang. Imprimeur, menuisier et sculpteur il a finit par renouer avec ce qui rend mieux cette dimmension artistique qu’il porte en lui: la guitare. Le mariage entre Joe et la musique est définitivement scellé et toute idée de divorce est impossible.
Son répertoire compte une cinquantaine de titres déjà travaillés et qui font crever les pistes de danses. Après N’go n’go publié en 1989, Joe crée la surprise avec son CD Freedom Power qui donne à découvrir un artiste plus confiant et plus prometteur.
« Je suis né noir et pourtant beau.
Ne prenez pas garde à mon teint basané
C’est le soleil qui m’a brûlé »
C’est sur cette note de révolte que Joe Kiki a bâtit sur un fond de soft reggea son premier album N’go n’go. L’album déclencha un vif intérêt auprès de la jeunesse et Joe devint monsieur N’go n’go traînant dans les rues de Lomé (Togo) ou d’Accra (Ghana) sa guitare acoustique.
Le soleil dont parle Joe dans cette chanson a toutes les couleurs: Politique, sociale, économique et même culturelle. Il s’agit du soleil qui brûle tous les espoirs et qui calcine la raison humaine dans certaines sphères de la société. Mais Joe lui n’a pas perdu son espoir « Ne t’abandonne pas aux idées noires, la joie du cœur voilà la vie de l’homme » lance t-il dans une admirable combinaison de Re-Sol-Mi qui embrasse les publics avec son Tempo très dansant sur fond de Reggea. Tout le monde croyait, avec la percée de N`go n’go, que Joe avait donné le meilleur de lui-même. C’est compter sans la ferme résolution de cette musique dont l’objectif est toujours aller de l’avant en sollicitant constamment la voix des enfants comme symbole de l’avenir et comme extinction de toutes les barrières raciales. Car Joe veut être le révolutionnaire qui sait utiliser sa voix et sa guitare comme Bob Marley, Lucky Dube ou Alpha Blondy pour fustiger cette folie des hommes qui conduit à la dictature, au viol des libertés, aux assassinats. Cette volonté de faire de son art une bombe de décibels est l’essentiel de son album Freedom Power.
FREEDOM POWER
Plus de huit ans séparent N`go ngo de Freedom Power. Huit ans au cours desquels Joe a cherché le Tempo adapté à son feeling. Il se perfectionne dans le doigté et se met entièrement à l’école de musique et après au centre EMEKO à Lomé où il apprend le piano. Huit ans au cours desquels l’artiste s’est beaucoup frotté avec son public à travers plus de mille concerts donnés en Afrique (Togo, Ghana, Benin) et en Europe (Allemagne, France, Belgique, Espagne, Suisse, Hollande…)
Le compact disc Freedom sorti en avril 1997 en Allemagne compte huit morceaux qui brassent dans un mélange détonant de reggae, calypso, gospels, avec de temps en temps l’intervention d’une rythmique à couleurs de Blues et des coups d’œil subtils à certaines mélodies du terroir. Les deux derniers morceaux « Ne crie pas » et « Ce jour-là » sont des versions acoustiques de la première et de la sixième composition de l’ensemble. Mais alors, peut-on se demander : « que chante Joe Kiki ». et la question mérite d’être posée à cause du kaléidoscope des tons que les six chansons laissen à découvrir.
On y retrouve tour à tour le politicien dans « Freedom Power », le philosophe dans « Ce jour-là et Noukêmewo » mais aussi le plaisantin qui invite à rire avec « Papa Amétafuto » (Papa escroc), « Ma femme m’a rendu Polygame ». Ces différentes dimensions n’excluent pas chez l’artiste son sentiment d’amour envers sa mère comme à la fois une redevance à la mère patrie et une louange à la femme. Dans la chanson « Ne crie pas » dans un zouk love berceur, c’est le poète enfant qui se souvient de tous les éfforts de sa mère pour le rendre heureux. En somme une musique qui invite l’adulte à se rappeler ses doux moments d’enfance où ses pleurs sont une communion avec toute la nature entière.
LE WORDS SHOW
L’essence de la musique de Joe Kiki se trouve dans la force évocatrice des mots.
Il y a des gens qui ont des armes pour faire valoir leurs droits ou leurs folies, de l’argent pour acheter leur liberté ou foutre par terre celle des autres. Joe lui, n’a que la guitare pour pleurer, pour dénoncer et enfin pour divertir. Si les mélodies de Joe, de par leur beauté font vibrer le corps, les mots eux vont droit au cœur pour cause. Freedom Power : Ce morceau est un hymne à la liberté, un cri de détresse face à tous les maux qui minent l’Afrique
« Le pouvoir est le seul argument
Qui satisfasse l’homme
Une race privée de pourvoir
Est une race privée de respect »
Le pouvoir! L’alibi pour lequel on tue, le mal qui fait pleurer et gémir les innocents mais qui font rire ceux qui s’en servent. Composé dans la tourmente des démocraties à la carte où le prix des divergences politique. Est la mort, l’exil où la prison. On y découvre un artiste fortement engagé qui veut mettre sa mélodie au service des opprimés.
Mais en attendant « Ce jour-là » où tout le monde se retouvera devant l’Histoire, devant sa conscience pour les bilans, il y a le sida le sida qui continue ses crimes. Pour Joe Kiki, il ne faut plus se faire le candidat résigné pour toutes les formes de morts. Si, pour l’heure, il n y a pas de remède contre la dictature, les abus de pouvoirs, il est important de se préserver contre « cette maladie mortelle : le sida ». Au total cet album résume tout un rêve: celui de voir tous les hommes libres et conscients, de guérir les mauvaises consciences de leur déraison. Enfin de rompre les barrières entre les hommes. En cela, Joe Kiki s’inscrit sur une liste déjà riche de noms comme Bob Marley, Alpha Blondy, Lucky Dube, Bob Dylan… Sa musique se veut sans frontières. On y vit l’Afrique, les Antilles, la Jamaique, les USA, l’Europe, un vrai pot pourri où tous les mélomanes trouveront leur goût et tous les bigs des boîtes de nuits leurs pas de danses. C’est donc en connaisseur de son métier et du terrain que Joe a travaillé cet album qui peut se définir comme un panorama de la conscience humaine dans ce qu’elle a de mégalomaniaque.
Joe Kiki « Evolution »: 10 ans encore après un long de silence, Joe Kiki revient avec un nouvel album qui s’intitule « Evolution » qui compte aussi huit titres comme Freedom Power…
Komla Gbanou
Le site de Joe Kiki : http://www.joekiki.com/