Cham et Elvire Bonduelle revisitent la salle d’attente

L’artiste plasticien togolais Cham et sa collègue française Elvire Bonduelle inaugurent du vendredi 27 novembre au 12 décembre 2009, dans la salle rénovée d’exposition du CCF de Lomé l’exposition « Salle d’attente ». Une intervention est prévue dans le hall d’accueil de l’Agence Air France de Lomé. Cette installation qui accueille et met en scène mobiliers, œuvres d’art et plantes décoratives, couronne 6 semaines de résidence de création de la plasticienne Elvire Bonduelle, diplômée de l’Ecole des Beaux Arts de Paris, tout comme Cham, son hôte Togolais.

Le projet est né aux Beaux Arts à Paris où les deux artistes se sont connus. Puis, il a fait son chemin et aboutit maintenant dans les précieuses pièces livrées au regard des visiteurs de cette exposition, grâce au financement du Service de Coopération et d’Action Culturelle de l’Ambassade de France, au soutien de Air France et du Centre Culturel Français de Lomé. Pour Cham, le point de départ de ce projet est de confronter deux pratiques esthétiques, deux univers artistiques différents. Deux options s’offraient à lui : inviter un ou deux anciens camarades des Beaux Arts de Paris à Lomé à l’occasion d’une résidence. Finalement, c’est seulement avec Elvire Bonduelle que le projet a fait son chemin jusqu’à son « achèvement » actuel dans cette installation. Elvire Bonduelle a foulé le sol togolais le 20 octobre 2009 et s’est aussitôt mise au travail. Pour elle, c’est une chance que de visiter la première fois un pays, non pas en touriste mais pour y travailler. Cela change les rapports avec les gens et la vision sur l’univers auquel on se confronte pour la première fois.

 

Elvire Bonduelle et Cham Photo Cyriaque Noussouglo
Elvire Bonduelle et Cham Photo Cyriaque Noussouglo

Toutes les œuvres de cette exposition ont été créées à Lomé, à partir d’idées et de planches soumises par l’artiste française à quatre artisans togolais choisis sur place : des spécialistes du travail sur métal, sur bois et sur rotin ont donc réalisé les formes imaginées par Elvire Bonduelle. Est-on réceptif à des œuvres d’art quand on est dans une salle d’attente ? Quel type de rapport avons-nous avec le monde dans l’attente ? Cette relation, comment la vit-on ? Consciemment ou inconsciemment ? « Quel est le rapport de l’Homme au temps et à l’espace dans une optique d’attente ? Le temps à passer est variable, selon qui ont est, où on est, qui on attend et ce qu’on attend. Souvent seul ou avec des inconnus, on promène le regard pour passer le temps. Au mur, des images s’offrent à la contemplation, un écran télé ou de vieux magazines… ».

Tout le projet consiste à imaginer une autre possibilité de salle d’attente, une autre façon d’attendre, donc de passer le temps, de surmonter l’angoisse, l’inquiétude ou la nervosité. Si la salle d’attente se destine naturellement à la halte, elle est également le point de croisement, le lieu des rencontres, de la confrontation et de l’expérience des différences. Il s’agit en fait dans cette exposition, d’un questionnement de l’attente dans une salle et donc d’un regard nouveau posé sur l’environnement, l’espace, le mobilier en particulier : « Quelles que soient l’impatience et la frénésie de l’attente, on est toujours sensible à l’environnement », affirme Elvire.

Cham et Elvire proposent chaises, fauteuils, tables, tableaux mais aussi magazines et plantes vertes. « Elvire s’est occupée du mobilier et moi j’accroche quelques-unes de mes œuvres », précise Cham dont les peintures appartenant à la série : Identités incertaines, cadrent bien avec l’inconnu de l’espace questionné : la salle d’attente. Le travail visuel se situe à la frontière des arts plastiques et du design. L’ensemble des pièces proposées ambitionne de réduire la distance du spectateur, de lui donner une sorte de commodité pour sa gestion du temps et de l’espace de l’attente. C’est pourquoi, les objets vont parler à celui qui attend ; les couleurs aussi lui font supporter, que dis-je, savourer l’accueil et l’attente : « les couleurs sont douces ; ce sont des messages discrets d’espoir et d’optimisme », assure Elvire.

L’originalité de ce projet réside aussi dans le regard autre que jette une artiste française sur un environnement togolais. « Nos deux univers sont différents », évidemment, constate Cham. Si l’attente est universelle, le rapport au monde ne l’est pas. Comme on regarde avec sa culture, tout l’enjeu est là. C’est pourquoi Cham s’est bien gardé de déjouer, de dévier le regard de sa consœur.

Un premier voyage à Lomé, les gens qu’on rencontre, ceux avec qui on travaille, ceux qu’on côtoie ; le regard qu’on porte sur les choses, les sons qu’on entend, les bruits avec lesquels on doit se familiariser. C’est un premier regard, une première expérience. Pour 6 semaines de séjour, l’essentiel se comprime dans les œuvres exposées. Quant à être attentif aux nuances et aux sous-entendus, il aurait fallu beaucoup plus de temps.

                                                                                  Cyriaque Noussouglo © Togocultures

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