Montassi Adjoh, religieuse et prêtresse vodou

La prêtresse Montassi Adjoh Photo: Gaëtan Noussouglo
La prêtresse Montassi Adjoh Photo: Gaëtan Noussouglo

Montassi Adjoh est encore très énergique malgré ses 73 ans. Prêtresse dévouée à Mami Wata et à Dan Agnidohouèdo, l’arc-en-ciel, sa vie semble consacrée à ses enfants, ses petits-enfants, arrière-petits-enfants et plus largement à tout son quartier de Dabara Condji à Bè Kpota où elle a su créer un vrai réseau de solidarité entre les habitants. Elle vit ordinairement dans ce quartier de Lomé, mais elle est prêtresse à Comé (Bénin), son village natal.

Quand on entre chez Adjoh Montassi on aperçoit tout de suite l’écriteau « Ici, c’est la maison de la Mamie du Togo ». Devant chez elle, elle trône au milieu de casseroles, à proximité du petit seau transparent en plastique dans lequel elle dépose ses sous. En effet, côté rue elle tient en effet un petit commerce, source à la fois d’un modeste revenu complémentaire mais aussi et surtout d’une intense vie sociale. Sur son stand elle vend : arachides, gari en petits sachets (farine de manioc) et petits gâteaux.

On se laisse facilement séduire par son regard pétillant, amusé, doux et plein de bienveillance. Elle affiche un sourire permanent, malgré les crises de douleurs que lui provoque sont genou usé. Montassi respecte l’autre et garde une écoute active. Habitée par tout ce qui est humain, sa maison est ouverte à tout le monde ! Elle lui donne son âme! Un peu coquine, taquine, joueuse, elle aime… profondément !

La prêtresse  vodou Montassi Adjoh en habit de cérémonies Photo: Marcel Djondo
La prêtresse vodou Montassi Adjoh en habit de cérémonies Photo: Marcel Djondo

Montassi est étonnée qu’on lui pose des questions sur ses croyances. Dans le ventre de sa mère, elle a été consacrée à une divinité avant de naître, quand elle avait 3 mois dans le ventre de sa mère. A l’âge de 3 ans seulement, Montassi entre au couvent et y reste jusqu’à 12 ans. Elle en garde un souvenir mitigé, se rappelant de la discipline qui y régnait et de l’intensité de l’apprentissage. En 1968, son 4e fils a un an et demi quand elle rentre de nouveau dans un couvent de Hébiésso, le dieu tonnerre. Elle parle aisément de son panthéon: Mami Wata, Avlékété, Hébiesso, Dan, etc. Montassi a eu 10 enfants (dont 4 sont décédés aujourd’hui).

Elle ne comprend pas vraiment les gens qui opposent le christianisme ou l’islam au vodou : « J’adore mes dieux comme les chrétiens adorent leur Dieu. On a d’ailleurs le même Dieu, ce sont les intermédiaires qui diffèrent. Mes dieux n’ont jamais fait de mal à personne. Utiliser le vaudou pour envoûter, empoisonner les gens et tuer est contre –nature ». Sur ce point elle rejoint de nombreux prêtres vodou dont il apparaît qu’ils ont souvent l’esprit plus ouvert que les pasteurs, curés ou imams.

De toute évidence, Montassi Adjoh a une pratique intelligente du rapport de l’Homme avec les divinités. Pour elle, quand on est malade, on va en consultation médicale. Quand la médecine humaine échoue, on s’appuie sur les dieux. Par contre, il n’est pas question de se jeter à corps perdu dans la religion et d’avoir recours à tout va aux forces occultes. Le vodou doit garder une place mystique réservée, mais ne doit pas servir à régler des comptes mineurs, au risque de multiplier les agressions en sorcellerie et d’étouffer ainsi le message d’harmonie qui est d’abord celui des religions traditionnelles, à l’instar du vodou.

Gaëtan Noussouglo

Cet article a été publié dans le livre Vodou, Voodoo sous la direction de Bernard Müller et Nanette Snoëp paru  aux éditions Loco

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