Essai: La mentalité africaine expliquée par un prêtre

Le 18 août dernier, Julien Kokou Kita, un prêtre togolais officiant en Allemagne, a fait la présentation de son essai « Pour comprendre la mentalité africaine. Les rapports afro-occidentaux en dynamisme constructif « , publié en 2003 chez l’éditeur allemand Lit-Verlag. L’ouvrage se propose d’aider à comprendre la mentalité africaine à partir des sources anciennes et essaie de restituer ce que l’Afrique et l’Occident ont de commun et de spécifique dans leurs mentalités. Spécifiquement, l’auteur, un prêtre, aux prises avec les difficultés de ses paroissiens et avec les membres de la communauté africaine immigrée en Allemagne, a écrit le livre pour expliquer les problèmes relationnels qui naissent des contacts en Africains et Occidentaux, et inviter à engager le dialogue sur ce que Africains et Occidentaux ont de plus profond, non pour affirmer la valeur inaltérable d’une culture, mais pour le relativiser en vue de réaliser l’accord conciliant : Africanité et Occidentalité.

Pour Comprendre la mentalité africaine de Julien Kita
Pour Comprendre la mentalité africaine de Julien Kita

A partir d’une étude comparative des langues africaines, l’auteur en vient à considérer que chez l’Afrique l’idée du nous, c’est-à-dire, l’idée de la communauté et la collectivité l’emporte sur celle de l’individu. «La langue détermine la mentalité, la mentalité porte les influences de la langue», dit-il. Des données sociologiques et anthropologiques qui expliquent bien le sens de la famille chez l’Afrique, et son comportement social à l’extérieur. Exemple : «un Ewé du Togo considère son cousin au village comme son frère. Arrivé à Lomé, ce même Ewé considère un ressortissant de son village comme son frère. A l’étranger en Afrique, un ressortissant togolais devient aussi son frère. Et en Occident, un Africain devient automatiquement son frère. Il en est ainsi de tous les Africains au Sud du Sahara. Ce sens du nous, ce sens de la famille, induit des rapports conflictuels quand ce Togolais entre en contact avec une allemande ou une Européenne. Dans un couple mixte par exemple, l’Européenne ne peut pas comprendre que son mari, ce Togolais, considère une africaine ou un Africain comme sa sœur ou son frère. Ces quiproquos conduisent souvent à des situations conflictuelles graves », dit le prêtre en guise d’explication de son ouvrage.

Si le livre invite l’Occidental à la compréhension de l’Africain, et vice versa, il n’en demeure pas moins que l’apologie du « nous » africain que fait le prêtre est quand même contestable sous certains rapports. En termes de liberté et de développement de l’individu, le « nous » africain n’opprime-t-il pas l’individu ? N’est-ce pas cet esprit communautaire qui annihile tout développement de l’individu et fait passer la communauté avant l’individu, qui est la base de certaines formes de dictatures sociales et politiques en Afrique ? Au regard de la situation chaotique que vit l’Afrique aujourd’hui, devant l’échec des initiatives collectives la réussite ne peut-elle pas qu’être individuelle ? L’enjeu est si important que le livre est autant demandé que son auteur. La bibliothèque de la Faculté des Sciences Sociales de l’Université de Münster a, entre avril 2003 et mars 2004, enregistré 17 emprunts de la version allemande et 9 de la française. L’auteur a acquis une célébrité en Allemagne en alignant conférences sur conférences.

Après sa licence en Sociologie et sa maîtrise en Philosophie à l’Université de Lomé, Julien Kokou Kita obtint son diplôme (BAC + 5) en Théologie en France. Il suivit une formation sur la famille en France où il obtint le titre d’Educateur familial.

Tony Féda© Togocultures

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