Théo Ananissoh revient du Togo où il a passé quelques moments pour se ressourcer dans ce pays, terre de ses parents. De son vrai nom Théodore Laté Lawson, Théo Ananissoh est né en Centrafrique et s’installe avec ses parents à Lomé à l’âge de 12 ans où il y fait ses études secondaires et deux années en Lettres Modernes. Il est titulaire d’un doctorat en Littérature générale et comparée obtenu à l’université de Paris III, Sorbonne Nouvelle.Cet écrivain togolais a à son actif quatre romans : Lisahoé (2005), Un reptile par habitant (2007), Ténèbres à midi (2010), L’invitation (2013). Il est actuellement en résidence à Brive La Gaillarde dans le Sud-Ouest de la France pour finir un nouveau roman. Théo Anassoh y livre dans Ecrire à Brive ses impressions sur son séjour. Togocultures vous propose « Ecrire à Brive, 7 »
« Dans la maison héritée de ses parents, près du stade de rugby, Charly nous reçoit pour la soirée. Fraîcheur et humidité à l’extérieur, chaleur accueillante de la cheminée dès qu’il ouvre la porte. Il y a là Jennifer, Patrick et Diarmid. Nous prenons place dans des fauteuils autour d’une tablette sobrement garnie d’aliments. Il sort une bouteille de champagne. Scott McKenzie chante San Francisco. D’emblée, une mélancolie nostalgique. Puis, la douce détresse de Bashung : « La nuit je mens ». Je demande : c’est une radio musicale ? « Non, une compilation de mes choix. » Charly – sexagénaire, grand, cheveux autrefois blonds, jolie voix métallique. « Je fais partie de la génération la plus bête de l’histoire, dit-il avec un sourire résigné. Nous avons cru et voulu changer le monde en 68, et nous avons tout envenimé. » Nous passons trois heures ainsi au coin du feu. Tout y passe. La crise de l’euro, la beauté de la Corrèze, DSK, Reagan de mèche avec les Ayatollahs contre Carter, la splendeur du plateau de millevaches en hiver, le taux de chômage effarant, le confit de canard… Après Bashung, Nougaro. Marilyn Monroe ensuite, qui minaude: « I wanna Be Loved By You ». Kennedy et son priapisme légendaire ; le maquis pendant la Résistance et ses zones d’ombre… Charly est sculpteur. Je me lève et contemple ses œuvres exposées dans le salon. Il nous dit le sens de chacune d’elles. Grace Jones, La vie en rose. Il nous raccompagne jusqu’au trottoir. En chemise, artiste frêle, têtu, qui ne se console pas de la corruption du monde. » Théo Ananissoh