Abiadé Basile ADEWUSI, musicien, critique de musique, expert, consultant, connu des acteurs culturels togolais et internationaux pour avoir présidé l’UNAM (Union Nationale des Artistes Musiciens) et actuel président du SARIAC (Syndicat National des Artistes musiciens interprètes et Compositeurs du Togo) a sorti le 10 septembre dernier au Goethe Institut de Lomé, un ouvrage majeur qui fera date dans la connaissance de la musique togolaise : La Chanson Togolaise, de la Tradition à la Modernité. La sortie de cet ouvrage financé par l’Institut Goethe et édité par la toute nouvelle maison les Editions Moffi de l’écrivain Gerry Taama, est en soi un événement.
Par Cyriaque Noussouglo
Un événement culturel et scientifique majeur
En effet, dans un pays où les monographies et les écrits scientifiques sur les secteurs de la culture sont pratiquement absents, le livre de Basile ADEWUSI vient d’abord combler un vide. Relatant un cheminement de près de 20 ans qui est aujourd’hui couronné par cet ouvrage, l’auteur, éclairant ses motivations, avait laissé entendre que pendant longtemps, on demandait à ceux qui cherchaient des éléments sur la musique togolaise de lire les écrits concernant la chanson ghanéenne qui est censée être proche de celle du Togo. Adéwusi avoue que l’idée d’écrire sur la musique togolaise lui est venue le jour où un de ses amis avait signé une monographie sur la chanson congolaise.
Ensuite, La Chanson Togolaise, de la Tradition à la Modernité a l’avantage de présenter un large panorama de la musique togolaise depuis les origines jusqu’à nos jours. Son ambition est de « faire la démonstration de la puissance de l’expression chanson dans l’élaboration de l’imaginaire des togolais ballotés au gré des vicissitudes de l’histoire ». Pour l’auteur : « La chanson est le reflet de notre âme ; par son harmonie et son lyrisme, elle nous socialise, nous humanise, nous élève. La clé des chants n’est donc pas de fuir son émotion mais de l’écouter, de l’exprimer et de proclamer sa pertinence. »
Il s’agit d’une contribution scientifique majeure que Togocultures salue à la hauteur de l’événement.
La chanson est au cœur de la vie socio-politique du Togolais
« Avec La Chanson Togolaise, de la Tradition à la Modernité, Abiadé B. Adewusi revisite, avec une précision et une recherche rares, la chanson dans l’identification géographique de la société multiethnique togolaise ». L’auteur montre que la chanson est présente dans toutes les composantes de la vie sociale du Togolais et permet de dire, de dénoncer, de se positionner : « les peuples du Togo chantent, et chantent beaucoup. Que ce soit pour contourner les entraves à la liberté du colonisateur, pour célébrer la liberté retrouvée, ou pour magnifier la simple joie de vivre ensemble, les Togolais ont toujours trouvé dans l’objet « chant », un vecteur de communication et de cohésion. »
Dans la Préface à cette première édition intitulée « Il n’y a pas de petite chanson… », l’écrivain Togolais Kangni Alem affirme : « Ce qui manque à la culture togolaise pour qu’elle décolle véritablement et impose au regard du monde son originalité, c’est moins une politique volontariste, laquelle est facile à construire, qu’un véritable discours qui en pose les limites tout en mettant en valeur ses possibilités et capacités à dire notre modernité. » Pour lui, le livre aborde toutes les questions relatives au sort et au statut de l’artiste, « il évite le piège mais porte le fer dans la plaie, et les pistes que sa réflexion laisse ouvertes sont autant d’invites à tous, aveugles, sourds, muets de la chose culturelle, à débattre enfin sans passion avec les arguments appropriés ».
Un concert de démonstration
Pour fêter la parution de ce livre de 387 pages émaillées de plus de 400 photos dont la recherche s’est effectuée dans la douleur et la patience, l’Institut Goethe et l’auteur ont convoqué ce 10 septembre 2010 une pléiade de musiciens. Il y avait ce jour Agboti Yao Mawuena, Ali Bawa, Ass Babadi, Dee Kwarel, Roger Dama Damawuzan, Jad Fozis, Jo Kiki pour les grands devanciers ; Laurence Montcho, Vanessa Worou, Joe Coo, Eric MC, Tonton CC avec son orchestre… pour les plus jeunes. Certains étaient sur la scène aux côtés de Basile Adéwussi et de son groupe, Les Tambours de Lomé, d’autres dans le public comme signe d’encouragement de leur confrère. Un riche spectacle en somme pour démontrer la vitalité de la chanson togolaise. L’auteur lui-même a démontré sa maîtrise des instruments musicaux modernes et occidentaux (accordéon notamment) et des instruments traditionnels (Atopani, le tam-tam parlant, tambour, gongs..). Sept tambours, un chef d’orchestre, l’auteur lui-même, une guitare, une voix aux tonalités imprévisibles… On a assisté à de l’Agbadja Fusion avec Joe Coo. Puis, c’était au tour d’Ass Babadi, grand ami d’Adéwusi de s’illustrer par deux chants agbadja à la gloire de l’auteur. Dans la pure tradition éwé !
Bio express
Né le 05 février 1952 à Lomé, Abiadé Basile ADEWUSI est le 1er Président du Syndicat National des Artistes Musiciens du Togo (SARIAC). Après son bac scientifique (Série D et son Certificat d’Aptitude Pédagogique au Professorat dans les collèges, il enseigne les Mathématiques dès 1977 à Lomé. En 1992, il est nommé membre du Comité International d’Elaboration et d’Organisation du Marché des Arts et Spectacles en Afrique (MASA) par l’OIF. En 1994, il devient vice-président du Conseil Francophone de la Chanson (CFC) pour l’Afrique de l’Ouest. En 1999, il joua le rôle de coordinateur du Comité africain de la Fédération International des Musiciens (FIM).
Artiste et plasticien, M. Basile Adéwusi est expert consultant en musique, critique et jury international des arts de la scène.
Cyriaque NOUSSOUGLO © Togocultures
