Le sacre d’Agboti Yao Mawuena à Lomé

Agboti Yao en concert Photo: Gaëtan Noussouglo
Agboti Yao en concert Photo: Gaëtan Noussouglo

Les années 80 ont vu apparaître celui qui s’est proclamé le Roi du Sogo, Agboti Yao Mawuena. Le rythme de ses chansons est très particulier, emprunté à son Havé natal, dans la préfecture de Zio que l’on retrouve « Tsona », « Sogo Party ». Sa chanson « Ablodé bladja », (Liberté ou indépendance totale) le rendra célèbre, très célèbre. C’était en 1990 quand les étudiants togolais ont réussi à créer une brèche dans la dictature et revendiquer le multipartisme, la démocratie au Togo. Et puis en 1993, on n’a plus entendu parler du Roi du Sogo, du moins au Togo. Il est parti en exil, dit-on.

Le temps des vieilles gloires battait son plein, le 22 août 2010, l’artiste apparaît sur scène, très fébrile, abattu. Il n’a exécuté qu’une chanson de son répertoire. Il remonte d’une maladie. Togocultures a voulu en savoir un peu plus. On dit qu’il a failli faire un accident vasculaire cérébral. Il souffre d’hyper tension artérielle. Les organisateurs de cet événement, Yao Dogan et Malick Ayéva, ont cru qu’il n’allait même pas assister à cette première soirée consacrée aux Vieilles Gloires de la musique togolaise. Il nous a dit « si Dieu le veut, je remonterai sur scène. Les malheurs sont désormais derrière moi ».

La dernière ou la troisième soirée du 5 septembre 2010, consacrée aux vieilles gloires de la musique togolaise, a été un vrai plébiscite pour Agboti Yao Mawuena que je n’ai jamais vu vraiment sur scène à part son apparition du 22 août, où il ne s’est rien passé de spéciale. L’Homme maîtrise la scène, ses rouages, il fait bouger les milliers de personne qui se sont déplacés ce jour sur l’Esplanade du Palais des Congrès de Lomé. Il y a avait un parterre d’artistes qui recevaient diplôme et honneur mais le public n’arrêtait pas de crier « Agboti, Agboti, Agboti ». C’est alors que le Roi du Sogo s’est déchainé. Il a exécuté 3 chansons de son répertoire. La foule était en délire, chantait, dansait. Elle réclamait à tue-tête « Ablodé Gbadja » mais Akoussa Vivi, animateur de la soirée a un timing a respecté, d’autres artistes à faire passer. L’orchestre Sassamasso et Mélo Togo se sont associés le temps de la soirée pour le High Life, Dama Damawuza et son Tirez tirez qui fait éclater. L’homme est un grand « ambianceur ». Puis, la foule hurle « Agboti, Agboti, Agboti ».

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Agboti remonte sur scène, le rythme était en lui. Ses pas fermes avec son « Lonlon, Tsona ». Le public connaît tout par cœur, danse, chante. C’était une fête populaire au sens propre du mot. Il continue de réclamer « Ablodé Gbadja ». Agboti avant d’exécuter « Lonlon » promet à la foule un retour sur scène. Il en a besoin pour vivre. Il promet un grand show en novembre et y convie le public. Cris et ovations accompagnent ses paroles. Mais cela ne les empêche pas de continuer à réclamer le morceau fétiche « Ablodé Gbadja », chanson de ralliement lors des manifestations pour un plus de liberté et d’égalité au Togo. L’artiste ne chantera jamais ce morceau, Akoussa Vivi interviendra après « Tsona » pour prendre le micro et annoncer d’autres artistes. La foule ne finit pas la soirée avec l’organisation. Elle se termine après Agboti, la bête de scène.

Agboti n’est pas une vieille gloire mais une gloire actuelle qui a l’adhésion de tout le monde. Ses chansons sont aimées par toute la couche de la population. Le travail sur les rythmes traditionnels est remarquable. Un héritage peut-être des « Hino ou Hasiono » de son Havé qui savent chanter et danser. Agboti Yao Mawuena a de vieux jours devant lui. « Ablodé Gbadja » n’est qu’une chanson. Le droit de tous les citoyens à la liberté, à l’égalité.

Togocultures espère qu’il est revenu pour toujours au Togo et ne sera pas inquiété pour sa chanson. Une chanson, un livre, un concert, une sculpture ou un spectacle de théâtre ne sont pas des missiles, des kalachnikovs ou des gourdins.

Gaëtan Noussouglo© Togocultures

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