L’Ambassade du Togo à Paris accueille actuellement du 12 octobre au 29 décembre dans ses locaux parisiens une exposition d’art contemporain où le visiteur pourra apercevoir les 21 œuvres des 3 artistes plasticiens que sont Yao Metsoko, Max Amegee et Fawzi Brachémi.
Animée d’un désir d’ouverture, l’ambassade a généreusement décidé d’offrir ses murs à la créativité de ses artistes ressortissants, le principe de la programmation étant de renouveler l’accrochage tous les trois mois, afin de rendre justice à l’extraordinaire richesse et variété des propositions artistiques. Le projet est placé sous le signe de la « flamboyance » c’est-à-dire à la fois de l’éclat de la nouveauté et sous les augures d’un arbre sublime (Delonix regia) à la floraison rouge spectaculaire.
Reportage Gaëtan Noussouglo© Togocultures
Les forces de l’esprit
En ouverture et en présence d’ambassadeurs, députés, amis du Togo, artistes, journalistes et hommes de culture, Yao Metsoko, qui s’est battu pendant cinq ans pour que cet événement puisse avoir lieu, prend la parole lors du vernissage du 12 octobre. Le commissaire de l’exposition déclare à l’endroit de Calixte Batossie Madjoulba, ambassadeur du Togo à Paris qu’ « en faisant des locaux de l’Ambassade du Togo en France, un espace de valorisation des créations artistiques de vos concitoyens qui élèvent le beau ainsi que nos valeurs, vous posez un acte authentique, et novateur. Mieux encore, vous contribuez symboliquement à libérer les énergies créatrices et les forces de l’esprit ».
En écho aux mots du commissaire (autant qu’artiste), résonnent les paroles émues de son excellence l’ambassadeur Calixte Batossie Madjouba. Il remercie Yao Metsoko pour son sens de combativité et pour son flair. Il se dit très touché par l’ambiance et la qualité du travail des artistes, tout en saluant ses invités, il déclare : « Ces expositions sont pour l’ambassade le moyen de mettre l’art togolais sur le piédestal et, par-delà, la culture de notre pays ».
« L’art est la vie, la vie c’est l’art »
Son excellence cite William Blake : « L’art est la vie, la vie c’est l’art » et poursuit : « c’est dire que l’art est intrinsèquement lié à notre vie quotidienne, quelle que soit notre origine. C’est pourquoi, nous nous réjouissons de célébrer, à travers cette exposition, cet art qui nous permet de « laver notre âme de la poussière du quotidien », comme aimait à le dire Pablo Picasso. ». Après ce discours inspiré, Calixte Batossie Madjouba invite le public « cordialement à faire de cette maison la sienne, chaque fois que votre agenda vous le permet, pour contempler de belles œuvres, telles qu’elles sont produites par des artistes togolais et amis du Togo. » L’ambassadeur en a profité pour rendre un hommage mérité à Paul Ahyi (1930-2010) « dont l’œuvre a profondément marqué la terre de nos aïeux et connu un retentissement au-delà des frontières nationales. Puisse son immense œuvre continuer d’inspirer d’autres créateurs pour le bonheur des générations présentes et futures. » En mémoire de cet artiste exceptionnel, un documentaire passe en boucle sur un écran dans la salle où se tiennent les invités.
Rouge flamboyant
Dans une myriade de tons, la couleur rouge des fleurs du flamboyant est bien le fil conducteur chromatique des œuvres présentées qu’elles renvoient à l’argile ancestrale ou au sang sacrificiel. Cette couleur est aussi celle que secrète une société en mutation. Ainsi, au moment des crises, l’art transcende toutes formes de clivages et se pose comme un sanctuaire, un endroit où on se pose. On retrouve aussi dans plusieurs œuvres une forme d’ancrage dans des traditions et valeurs ancestrales. Ici, un oiseau s’envole avec ses couleurs chatoyantes pour témoigner de la contemporanéité de l’espace et du temps. Là, un volume 3 D donne du volume à la toile. L’art célèbre les mystères de la vie. Les couleurs deviennent irréelles pour englober le monde dans une unité. Les artistes mixent l’ancien et le contemporain car les grands esprits se nichent dans le détail, dans la finesse des traits. Les couleurs n’atteignent leur quintessence qu’en se mariant aux autres.
L’artiste ami du Togo n’expose que deux de ses œuvres, la primauté étant donnée aux Togolais. Ainsi le franco-algérien Fawzi Brachémi, graphiste, illustrateur, destinateur qui peint depuis 1990 en France expose ses toiles qui dessinent l’espace et inventent l’alphabet des couleurs et chante l’hymne à la Paix.
Max Amegee avec un physique idéal de boxeur poids lourd n’en est pas moins avocat au barreau de Paris, écrivain et peintre à ses heures perdues. Inspiré souvent par la technique dite Zota du maître Paul Ahyi, au lieu de faire de la pyrogravure, il utilise l’huile acrylique pour peindre ses toiles sur fond noir. Ses œuvres rehaussent les couleurs d’Afrique, ses personnages sont portés vers le feu, l’eau, la terre et appellent à l’unité des peuples.
Yao Metsoko, sur son 31 à l’ambassade avec sa double casquette de commissaire d’exposition et de plasticien est vraiment le maître de cérémonie. Son style de gentleman, il le tient d’un père diplomate. Il peint depuis plus d’une trentaine d’années et expose en Europe et en Afrique. Outre la poursuite de ses activités artistiques, il rêve de partager ses expériences et acquis dans une école d’arts plastiques à créer au Togo. Son travail vacille entre les valeurs traditionnelles africaines et chrétiennes, un syncrétisme de valeurs pour tendre vers une culture universelle.
Création d’un fonds
Il ne s’agit pas là d’une action éphémère mais d’une intention au long cours. Outre la programmation trimestrielle prévue, un fonds d’œuvres destiné au Togo est créé. A chaque exposition, deux œuvres seront données à l’Etat togolais pour alimenter ce fonds.
On regrettera quelque peu l’exiguïté des lieux qui ne fait que renforcer la force qu’irradient les œuvres. Le Togo est un petit pays, certes (tel en a voulu le hasard des tracés coloniaux), mais la voix de ses artistes portent bien loin.
Pourtant, un espoir s’est éveillé. A croire les réactions, plusieurs partenaires culturels souhaitent à leur tour accueillir l’exposition, car l’initiative a séduit. Chantal, une française présente lors de l’événement d’ouverture, loue la qualité des tableaux et l’accueil qui ont été réservés aux artistes et au public.
Dans la dynamique aujourd’hui déclenchée, gageons que l’Etat togolais puisse mettre la main à la poche pour constituer ce fonds et acquérir ces oeuvres afin de permettre aux artistes à vraiment vivre de leur art. Pour l’heure, le public est invité à pousser leur curiosité pour contempler les tableaux exposés dans les couloirs, les salles de l’Ambassade du Togo à Paris.
Gaëtan Noussouglo© Togocultures
Point info :
Ambassade du Togo à Paris : 8, Rue Alfred Roll dans le 17e arrondissement
Exposition « Flamboyance » : Du 12 octobre jusqu’au 29 décembre 2017
Horaires des visites : du lundi au vendredi, de 14H à 17 H Téléphone : 01 43 80 12 13
Entrée gratuite