Le territoire togolais regorge de biens patrimoniaux importants dont la conservation et la valorisation sont des éléments indispensables pour la compréhension de l’histoire et de l’évolution des sociétés qui le peuplent. Ainsi, dès la période coloniale française, le 25 août 1937, a été signé le décret relatif à la protection des monuments naturels et des sites de caractère historique, scientifique, légendaire ou pittoresque des colonies, pays de protectorat et territoires sous mandat relevant du ministère des Colonies .
Ce décret a été promulgué au Togo par arrêté no 558 du 13 octobre 1937 qui fait une vague allusion à la question de la conservation du patrimoine. Par la suite, le 23 novembre 1990 la loi no 90-24 relative à la protection du patrimoine culturel national sera votée. Cette loi fait de la protection et de la sauvegarde du patrimoine culturel national une prérogative de l’État. De quels patrimoines dispose donc le Togo ?
Le patrimoine culturel
Le législateur togolais définit le patrimoine culturel «l’ensemble des biens, meubles ou immeubles, présentant un intérêt historique, scientifique, technique, religieux, artistique, littéraire ou touristique et dont la conservation et la protection revêtent une importance majeure pour la communauté nationale». Cette définition fait une large part au patrimoine matériel au détriment de l’immatériel. Mais le patrimoine préexistant à cette définition, quels en sont les différents types qu’on retrouve au Togo ?
Le patrimoine culturel matériel
Jusqu’ici cet aspect du patrimoine culturel a bénéficié d’une attention presque exclusive. Conséquemment douze(12) biens sont inscrits sur la Liste nationale des biens culturels dont 6(six) sur la Liste indicative de l’UNESCO et un un(1) sur la Liste du patrimoine mondial.
Les sites et monuments historiques
L’histoire politique et sociale du Togo a laissé des traces remarquables qui doivent être transmises aux générations futures. Ces traces, sans être forcément des réalisations particulièrement remarquables, sont parfois un palais, une maison traditionnelle, un vestige architectural découvert lors de fouilles archéologiques, un cinéma, une école… bref tout immeuble qui présente des intérêts énoncés dans la définition que la loi togolaise donne du patrimoine culturel. On peut citer :
– La Cathédrale de Lomé : Important chef-d’œuvre du Frère Johannes, la cathédrale de Lomé est de style gothique avec ses hautes tours. Elle a été construite par les missionnaires allemands de la Société du Verbe Divin entre 1901 et 1902.
– L’école professionnelle Saint Joseph de Lomé « Brotherhome » : Construite par la Mission Catholique de 1906 à 1912 comme centre de production et de formation (mécanique, couture, menuiserie, imprimerie etc), l’un des plus remarquables d’Afrique occidentale à l’époque.
– Le temple évangélique d’Apegamé : Réalisé en 1906 et 1907 par la Société des Missions d’Allemagne du Nord.
– Le monument aux morts de Lomé : Ce monument a été érigé en 1956 pour célébrer l’accession du Togo au statut de République autonome.
– Le monument de l’Indépendance : Conçu et réalisé par l’architecte français Georges de Coustère assisté par Paul Ahyi, alors jeune peintre et sculpteur togolais, ce monument a été dévoilé le 27 avril 1960 date de l’indépendance du Togo.
– La Cathédrale de Kpalimé : De style gothique, elle surplombe toute la ville de Kpalimé avec ses hautes tours. Elle est construite en 1913 pendant la période coloniale allemande. Elle a été restaurée.
– Les ruines de Kamina : Situé à 20 kilomètres d’Atakpamé, Kamina est l’ancienne base militaire allemande détruite durantla 1ère Guerre mondiale en août 1914.
– La poudrière allemande de Sokodé: Construite avant 1914, elle est située sur une colline derrière le campement de Sokodé. Cette poudrière est composée d’un rempart édifié en pierres solidement disposées les unes sur les autres et entourant un magasin couvert de tôle où les armes et les munitions étaient gardées.
Les sites archéologiques
Un site archéologique, c’est tout terrain, formation géologique, bâtiment, ensemble ou site qui comprend ou est susceptible de comprendre des biens archéologiques, Au Togo, les fouilles archéologiques sont assez récentes. Elles n’ont débuté qu’en 1980 avec le Professeur Posnansky de l’Université de Californie à Los Angeles et poursuivies par des équipes d’archéologues nationaux sous la conduite de M. Kuévi et de Mme Aguigah de 1984 à 1990. Ces fouilles ont ainsi permis de mettre à jour une abondante quantité de vestiges dignes d’intérêt historique et de se rendre à l’évidence que l’une des richesses culturelles du Togo est sans aucun doute son patrimoine archéologique qui témoigne de l’occupation ancienne de ce territoire. En effet, les vestiges et artéfacts retrouvés dans plusieurs sites permettent de mieux comprendre le passé et d’enrichir l’histoire nationale de données concernant le mode de vie ou les événements marquants de l’occupation humaine ancienne de cet espace. Même si la gestion de ce patrimoine n’est pas suffisamment réglementée en raison du manque de textes juridiques appropriés, certains des objets issus desdites fouilles sont en exposition permanente au Musée national du Togo (MNT) et constituent des « témoins » matériels de l’histoire du Togo.
Comme sites archéologiques, nous citerons, entre autres :
– les sites d’élaboration d’outils lithiques du plateau de Pana (Sud-Sud-Est de Dapaong au Nord Togo, à une altitude d’environ 400 mètres)
– les vestiges de Tado (au sud -est) et de Notsè (lieu de l’ancien Royaume Ewé, à environ 100 kms au Nord de Lomé)
– les vestiges en pierres du plateau de Danyi (environ 180 kms au sud-ouest de Lomé).
Certains de ces sites archéologiques sont inscrits sur la Liste nationales des biens culturels.
Le patrimoine culturel immatériel
Le Togo dispose d’un riche patrimoine culturel immatériel dont la protection et la valorisation ne sont pas prises en compte par la loi 90-24 du 23 novembre 1990 portant protection du patrimoine culturel national. Ce patrimoine immatériel se manifeste à travers toutes les animations culturelles et festives, les cérémonies et rites initiatiques qui s’organisent au niveau des populations locales.
Il n’existe pas d’inventaire exhaustif du patrimoine culturel togolais. Pour remédier à cette situation, le décret n° 2009-175/PR portant établissement d’un inventaire général du patrimoine culture1 du Togo a été pris le 12 aout 2009. Cet inventaire qui est toujours en cours recense l’ensemble du patrimoine culturel matériel et immatériel présentant un intérêt historique, archéologique, culturel, éducatif ou scientifique.
Le patrimoine naturel
Aux fins de la Convention de 1972, sont considérés comme « patrimoine naturel »:
-les monuments naturels constitués par des formations physiques et biologiques ou par des groupes de telles formations qui ont une valeur universelle exceptionnelle du point de vue esthétique ou scientifique,
-les formations géologiques et physiographiques et les zones strictement délimitées constituant l’habitat d’espèces animale et végétale menacées, qui ont une valeur universelle exceptionnelle du point de vue de la science ou de la conservation,
-les sites naturels ou les zones naturelles strictement délimitées, qui ont une valeur universelle exceptionnelle du point de vue de la science, de la conservation ou de la beauté naturelle.
Comme élément du patrimoine naturel du Togo, il y a les aires protégées qui sont, selon loi n° 2008-005 du 30 mai 2008 portant loi-cadre sur l’environnement, « une zone géographique délimitée sur terre ou en mer, nommément désignée, réglementée et gérée par des moyens appropriés et spécialement vouée à la conservation de la diversité biologique, des ressources naturelles ou culturelles associées ». Jusqu’en 1990, le Togo disposait légalement de 83 sites naturels considérés comme des écosystèmes particuliers couvrant environ 800 000 ha, soit 14.2% du territoire national (tableau 1). Trois de ces aires sont érigées en parcs nationaux (Fosse aux Lions, Fazao-Malfakassa, Kéran) et sept en réserves de faune et de flore (Alédjo, Djamdè, Galangashie, Togodo-Nord, Abdoulaye, Togodo-Sud, Oti-Mandouri) . Malheureusement, suite à la croissance démographique jointe aux problèmes économiques et socio-politiques de ces dernières années, aujourd’hui, la plupart de ces aires sont partiellement ou totalement envahies. Des études sont actuellement en cours au Ministère en charge de l’Environnement pour déterminer l’occupation réelle.
Tableau 1 : Superficies et répartitions géographiques des aires protégées au Togo
REGIONS | SUPERFICIETOTALE (ha) | SUPERFICIE DESAIRES PROTEGEES (ha) | Nombre de forêts classées | |
1 | SAVANES | 847.000 | 166.906 | 8 |
2 | KARA | 1.173.800 | 198.143,40 | 22 |
3 | CENTRALE | 1.331.700 | 252.087 | 14 |
4 | PLATEAUX | 1.697.500 | 142.855 | 31 |
5 | MARITIME | 610.000 | 33.297,41 | 8 |
5.660.000 | 793.288,81 | 83 | ||
Parmi ces biens du patrimoine naturel du Togo, quatre(4) sont inscrits sur la Liste indicative du patrimoine mondial de l’UNESCO (la réserve de faune d’Aledjo, le parc national de la Kéran et la réserve de faune Oti-Mandouri). Parallèlement, le complexe Oti-Kéran/Oti-Mandouri est inclus depuis 2011 dans le Réseau mondial des réserves de biosphère de l’UNESCO.
En dehors des aires protégées, d’autres attraits et curiosités naturels font la beauté du Togo, il s’agit entre autres des cascades (Kpémé, Womé, Yikpa, Ayomé, Aklowa, Bafilo…), les plages sablonneuses de Lomé et des autres villes côtières.
Komi N. F. TUBLU,
Consultant en gestion et mise en valeur de patrimoines culturels
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