La Guerre des Panneaux de Paulin Assem

Il était une fois un petit pays africain, qui n’était pas libre. On ne pouvait pas y dire ce qu’on voulait. La dictature militaire imposait la direction qu’on devait prendre, la manière de penser. Le guide éclairé garantissait l’ordre et la sécurité. Il avait droit de vie et de mort sur tous. Mais c’était normal d’avoir des militaires à la tête des pays sur le continent. Régulièrement, le peuple marchait pour brandir des affiches, panneaux et pancartes : « Vive le Président! Longue vie au Président! »

Mais un beau jour, une tempête inattendue s’est levée à l’Est et s’est abattue sur ce petit pays qui se prenait pour la Suisse de l’Afrique. Ce vent a arraché les bandeaux et œillères qui empêchaient la population de voir sa misère et les atrocités des camps de redressement.

« Mort au dictateur ! Mort au Tyran ! »

Ce vent a ôté les baillons qui muselaient le citoyen. N’importe qui pouvait créer sa radio. Les chaînes de télés privées sont nées. Ce vent de liberté a brisé menottes et chaînes. Le citoyen peut enfin écrire ce qu’il pense: La presse privée se déchaîne.

« Liberté totale! Mort au dictateur! Mort au Tyran! »

Le citoyen découvre ses droits, il foule aux pieds les lois d’antan. C’est la liberté ! Il veut abattre le tyran et l’armée avec. Erreur monumentale ! Cette dernière ne se laisse pas faire. Ce n’est pas encore la guerre, c’est juste une grève. Elle est dure.

« L’Alternance ou la mort ! Mort au tyran ! »

La grève dure. L’armée tire : Pan ! Sur les manifestants. Pan ! Sur la Primature, actuel Palais de Lomé ! Ce n’est pas encore la guerre. Les espoirs meurent, les gens aussi. Le temps passe.

« Le dictateur est mort ! Vive le Tyran ! »

Même pas vingt-quatre heures de répit. L’espoir est bel et bien mort. Le changement, l’alternance politique ? Un rêve lointain. Le peuple avait faim de liberté, maintenant, il a faim tout court. Bouche affamée, n’a point d’oreille, parait-il. On met une trêve au combat idéologique, on doit d’abord manger. C’est depuis ces considérations que grâce à la liberté d’expression, de nouveaux métiers ont vu le jour, et que la ville de Lomé s’est transformée en un champ de bataille où les sociétés et individus s’affrontent à coup d’affiches, panneaux et pancartes.

Publié en Allemand, anglais et français par maichi Lcb Diplomatique

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