En écoutant les chansons de Vaïda, on est étonné du travail accompli sur la voix et les rythmes traditionnels. Son album « Mafoutiti » est un écrin rythmique, mélodieux et un tantinet aérien… La rythmique de cet album oscille entre le traditionnel et le religieux. Vaïda contrôle sa musique, donne la meilleure d’elle-même comme si elle laisse libre choix au public de juger de la bonne qualité de son produit… Ce qui se comprend puisqu’à sept ans, elle chantait déjà dans la Chorale de l’Eglise Evangélique Presbytérienne « Jeunesse de Hédzranawoé », dans la banlieue de Lomé, où elle a trouvé sa voie.
Quand nous avons croisé Vaïda Massan Gnassounou avec son mari, on découvre une belle femme, soignée, élégante qui respire la joie de vivre. Entre inquiétude et envie de réussir son travail artistique, elle affiche une détermination à peine voilée de parvenir par la musique à s’imposer aux habitants de son pays et au monde. Projet noble en soi qui contraste avec un environnement togolais où l’artiste est à la fois son producteur et son diffuseur. Vaïda se rassure avec un engagement franc, sincère et ludique : « Les difficultés étaient là avant moi. Les problèmes financiers aussi. Le talent est là. J’ai tout plein de chansons et je n’ai personne en face pour impulser ». Pourtant, elle a son actif, deux albums : Mokpokpo, 2007 et Mafoutiti, 2009. Pèle mêle, elle nous parle de ses expériences dans la mythique chorale Mawu fé Nusé de Auguste Dogbo, de son rêve de devenir artiste alors que ses parents privilégiaient avant tout ses études, de son orchestre Gloria qui l’accompagne lors de ses concerts et enfin de sa vie de famille. Elle passe au peigne fin sa vie sans aucun tabou. Finalement, c’est sa musique qui attire le plus notre attention.
Dans Mafoutiti, elle souligne un amour total, une grandeur de vie au-delà de l’humain dans un total attachement à son être aimé. Ce qui la rapproche un peu de Bella Bellow. Sa voix tire da la basse au mezzo-soprano digne d’une cantatrice ou d’une chanteuse d’opéra ou du jazz. Certains affirment qu’elle possède une voix qui s’apparente, à des moments, au rugissement d’un lion. A cette comparaison, elle esquisse un sourire. « Je suis ma voix. Elle fait corps avec moi. Elle rugit comme le Lion de Juda ». La voix n’est –ce pas une richesse ? Plutôt un don de Dieu : « Ce qui est à moi, c’est ce qui m’appartient et personne ne peut me la ravir. »
Les chansons de Vaïda Massan Gnassounou sont d’abord dédiées à son Créateur. Elles en appellent au pardon et à la repentance : « quand on devient un nouvel être dans un environnement fétide, le Créateur vous lave et vous devenez plus blanc que neige. Alors, une nouvelle vie se dessine ». La nouvelle vie, c’est aussi chanter et danser pour le Créateur de l’univers et ses créatures. La nouvelle c’est louer et adorer l’Eternel. Vaïda fait tout aussi un clin d’œil au « High life », haute vie de désirs, de délires et de plaisir. Se nouer dans ces délices, la conduit tout naturellement auprès de son Dieu, et aussi aux côtés de ses afficionados comme de tout le monde. Etre chrétien, n’est-ce pas construire un monde de cathédrale où la voie emplit tout l’espace pour refonder l’être.
Vaïda s’approprie du rythme Kabyé, le « kamou », comme d’un appel à préserver la nature humaine et l’environnement. Ne sommes-nous pas la nature ? L’Homme n’est-il pas la nature, l’univers ? Ne sommes-nous pas le temple du Saint-Esprit ? Préserver la nature, n’est-ce pas s’auto- préserver et trouver la gracieuse liberté de mieux vivre ?
Vaïda est une femme raffinée qui cultive tout autant l’élégance de sa musique que de sa voix. Elle touche tous les univers musicaux togolais : de la cantata au kamou en passant par l’akpèssè . Les thèmes de ses chansons décryptent la vie, celle religieuse, l’amour, la paix, la préservation de l’environnement, les droits des enfants et l’éducation, la mère-patrie. Quand pétille l’éloge à la mère patrie, elle appelle tous ses compatriotes à aimer et à respecter la terre de ses aïeux, terre de richesse et de joie.
Les chansons de Vaïda révèlent l’envoûtante délicatesse de la voie, au croisement entre le vivant et le divin, captent le monde originel pour amener l’Homme à construire son modeste édifice dans la joie, la bonne humeur pour enfin goûter à la vie en abondance et dans le respect de son milieu et de son environnement.
Gaëtan Noussouglo © Togocultures