Du Togo au Burkina Faso en passant par le Bénin et le Nigéria, l’auteur, metteur en scène et écrivain Emmanuel Lambert de la Compagnie Bulles de Zinc connait bien l’Afrique. En 2008, lors du Festival-ateliers Filbleu, il lit son texte Exit, exit. A l’Espace Filbleu. Le metteur en scène ivoirien Fargass Assandé charmé par le texte accepte de le créer avec lui. En février 2014, Exit exit est publié aux éditions L’Harmattan à Paris. Togocultures vous en donne une note de lecture.
Exil exit est un monologue qui dure de dimanche à dimanche, une vie, la vie d’un exilé à la recherche du bonheur. L’exil est-il le symbole de la mort ? La mort de ses valeurs, la résurrection de l’intolérance, l’absurdité de la vie ? Un personnage probablement un Européen attend ce dimanche Abdou. Très vite, on comprend qu’Abdou ne viendra jamais. Le public se contentera de son histoire.
Abdou est marié et père de deux enfants. Dans son pays, il a accueilli un blanc, un Européen. Son prénom ne sera jamais donné dans l’œuvre. Content de l’hospitalité de la famille d’Abdou, l’Européen l’invite à son tour chez lui, comme pour plaisanter. Abdou le prend au mot. Aidé par la famille et le village, il a traversé le désert, la mer et a échoué dans l’appartement de son ami, idée d’assouvir sa part de rêves européens. Au lieu de venir seul et s’imprégner de la réalité de son milieu d’accueil, il débarque avec sa joie de vivre, sa vie de débrouille. L’Européen n’aime pas trop cette vision du monde où on refuse de conformer aux règles du milieu. Abdou ne veut ni de papier ni de boulot. Abdou finit par contaminer son ami par sa joie de vivre. Et les deux amis repoussent les nuits aux confins du bonheur. Sur sa vieille mobylette, à 3h du matin, Abdou quitte son immeuble pour livrer des œufs aux communes. Quand il est libre, il joue à la guitare et chante en bas de l’immeuble. Sa vie d’homme heureux a réveillé les insomniaques, les racistes de tous poils et il le payera chèrement.
En partant des faits divers, Emmanuel Lambert en vient à poser deux mondes opposés par des modes de pensée et de vie. Il dresse un violent réquisitoire contre l’Europe, ses normes, ses frontières et sa politique de bouc-émissaire, l’étranger. Ce texte poétique et accessible à tous n’épargne pas non plus l’Afrique et sa démocratie de façade.
Emmanuel Lambert, Exil. Exit. suivi de L’Afrique en collection Harlequin, Éditions L’Harmattan, Collection Théâtre des 5 continents, Paris 2014, 50 pages, Prix 8€
Gaëtan NOUSSOUGLO © Togocultures