Le seul endroit où le bonheur frappe à la porte de Nimon Toki Lala, c’est sur scène. Transportée d’un univers à l’autre, d’une vie tranquille à une vie de danseuse provocatrice. Elle chante alors la vie, le bonheur, fait écran à la maladie et dénonce les travers des hommes.
Tous ceux qui me connaissent, confie-t-elle, ne me reconnaissent pas. A tort, certains pensent qu’elle se shoote à la drogue, provoque les hommes pour avoir de l’aventure ou boit avant de monter sur scène. Image classique qu’on donne aux artistes femmes en Afrique : femme à la conduite dissolue. Nimon Toki Lala balaie du revers de la main ce lieu commun. Ce bonheur-là lui manque depuis trois ans où elle était « en stand by » suite à la maladie de sa mère, de sa mort et de ses funérailles. Elle projette de retrouver la scène d’ici à l’année prochaine, de sortir son nouvel album et reprendre la main.
Sa mère a une grande importance dans sa vie. Nimon Toki- Lala est née dans des conditions difficiles. Sa mère décédée en 2008 est très présente en elle. A la naissance da Lala Pyalo, sa mère n’avait que deux pagnes. Le premier lui couvre le corps et le second lui servait de natte ou de lit. Et la petite Lala dormait sur son ventre. Son père, amateur de Guy Des Cars, a fui les « ablodé sodja » et ne reviendra que plus tard pour faire à sa mère six autres enfants. L’aînée de la famille est prédestinée à un avenir meilleur.
Un événement changera le cours de sa vie. En classe de 4e, elle a osé connaître l’amour. Un jeune universitaire revenu de Lomé, la connaîtra et sept mois plus tard, les parents se rendent compte que leur enfant est enceinte. Elle a dû fuir Kara pour accoucher chez une cousine à Lomé. La famille et l’honneur ! C’est à Lomé que le bonheur lui sourira. Son talent de chanteuse et de danseuse se réveille. En 1978, Yta Jourias choisit ses danseuses pour une tournée européenne, elle fait partie de l’aventure et restera en France. La galère a repris. Elle s’inscrit en cours de danse au centre américain avec Sam Mangouana, chante et va souvent en boîte. Dans une boîte de nuit, elle apprend un samedi qu’elle doit déposer son dossier pour le Prix découverte RFI 1982. Et le dimanche est mis à profit avec le guitariste Toto Guillaume. Au finish, le lundi elle dépose quatre morceaux connus des mélomanes loméens, dont « banina », « La paille et la poutre ». C’est ce dernier morceau qui fera la joie de Pyalo Lala Nimon Toki. Elle rentre triomphalement au Togo pour la remise des prix. Prise en charge par RFI, elle a écumé les grandes scènes européennes et françaises. Elle se souvient du Bourget à Paris, du festival de Genève et des artistes croisés comme Johnny Halliday, Dalida. « Tout ce que je suis aujourd’hui, je le dois à RFI et à personne d’autre. Je me suis fait moi-même aussi grâce à mes efforts, à mon désir d’aller de l’avant, de réussir mon métier et balayer les préjugés de mon père sur les femmes ».
http://www.youtube.com/watch?v=rlF9LvKRRtY
Aujourd’hui, elle a à son actif sept albums. Les plus connus sont « Obé », « Ayélé », « Bonne année ». Nimon Toki Lala excelle dans le rythme soukous et quelques rythmes de son terroir. Elle a été longtemps produite par Jimmy’s Productions sauf son dernier album qu’elle a produit elle-même. Elle a chanté avec Aurlus Mabélé, le nouveau roi du Soukous et Awilo Longomba.
Elle regarde l’avenir avec sérénité et balaie du revers de la main les critiques faciles « Oui, j’ai chanté pour Eyadéma. Et alors ? Qui n’a pas chanté pour lui ? ». Elle pense faire un grand retour sur les scènes nationales et internationales l’année prochaine. Ainsi, à sa retraite, elle pourra profiter des mets succulents qu’elle refuse pour mieux soigner sa forme et préserver sa corpulence de danseuse.
Gaëtan Noussouglo © Togocultures