Tant annoncée, la Bimod 228 (la biennale de la mode au Togo) a pris fin hier soir par son défilé des modèles de plus de huit stylistes africains de renom, dans les jardins de l’Hôtel Mercure Sarakawa. Abdoulaye Sadji (Nigéria), Timothée (Togo), Pathé’o, Gilles Touré (Côte d’Ivoire), Clara Lawson (Burkina Faso), Karim (Ghana), Zen Bilady (Maroc) et Bamondi (Togo) ont tenu en haleine un public venu en masse pendant trois heures d’horloge.
La plupart des modèles présentés sont travaillés sur le tissu-pagne- spécialement le wax hollandais- et les stylistes allient modernité et horizons africains, avec le souci de mettre en valeur le corps de la femme, lui donnant beaucoup plus forme et allant. Il en est ainsi des modèles du styliste modéliste Timothée qui a misé sur des dames flamboyantes, présentant des robes en queue de poisson, cousues sur du lin, de la soie avec un fort accent sur le tissu-pagne wax. Par contre la styliste togolaise Bamondi, l’organisatrice de la Bimod 228, est la seule avec la marocaine Zen Bilady, à n’avoir pas trop travaillé sur des modèles imprimés sur tissus-pagnes. Sa collection blanc et noir, en soie, explore un univers antithétique et occidental, avec des coupes arrivant juste au genou et mettant en exergue la corpulence féminine.
Les collections de l’Ivoirien Gilles Touré sortent quand même du lot. Pagnes, dentelles, soie, travaillés sur une esthétique qui allie univers africain et horizon occidental, dans un but évident de rendre sexy les femmes. C’est plutôt une collection glamour avec un côté paillette.
Gigantisme et sens
La Bimod est le second festival de la mode au Togo, mais elle se distingue de sa rivale Alokpa par le fait qu’elle présente uniquement des stylistes confirmés, de renommée internationale ; Alokpa ne présentant que de jeunes stylistes sortis des centres de formation. Gigantisme, sens, valeurs, et beauté, voici comment peut se résumer la première édition de la biennale de la mode au Togo. Pour sa première fois, Bimod 228 a voulu frapper les esprits et les marquer durablement : gigantisme et puissance des installations techniques, nombre impressionnant d’invités (plus de 2500), défilé de huit grandes marques de la mode africaine, invitation de l’artiste de la vedette de la chanson nationale Afia Mala, mobilisation impressionnante de sponsors, valorisation des personnalités que l’on peut montrer comme modèle dans la société. Ceci constitue un spécifique historique sans précédent dans les pages de la culture au Togo. Et pour démontrer qu’au Togo l’heure de la renaissance doit sonner, pour animer la soirée, les organisateurs sont allés chercher à Africa Numéro 1 Jules Ahadzi, le grand espoir de l’animation événementielle dans les années 1980 contraint à s’exporter pendant les troubles socio-politiques. Est-ce le tocsin du retour des meilleurs ? Toujours est-il que les organisateurs ont voulu donner un sens fort à leur événement. En témoignent les prix Bimod récompensant « trois catégories de personnes qui se sont distinguées par les fruits de leurs efforts.
«Le trophée pour l’engagement socio-culturel» à Tata Avlessi, le président de la fédération togolaise de football, richissime homme d’affaires, qui a fait des transformations importantes dans son village natal de Masseda, dans la préfecture des Lacs, en construisant des infrastructures socio-culturelles. L’homme qui a fait fortune dans les BTP en Côte d’Ivoire, ne cache pas qu’il est riche et est le premier mécène dans un pays où les gens riches sont frileux à s’adonner au mécénat.
La seconde récompense, «le trophée pour la contribution au développement économique du Togo», est allée à une courageuse dame, Mme Rose Creppy, icône du commerce du pagne ; tandis que Simone Gnassingbé a été récompensée par «le trophée pour l’engagement humanitaire».
Le tout dans une ambiance musicale entretenue par King Mensah, le roi de la musique traditionnelle, Afia Mala et l’Ivoirienne Betika. Si King Mensah enflamme comme toujours le public, dépassant la mesure des morceaux qu’il doit chanter, Afia Mala a ému le public. Radieuse et belle, sculptée dans un corps de mannequin, l’extérieur semble avoir déteint sur cette femme qui a quitté le pays pendant les troubles des années 1990. Ses vieux morceaux ont été repris en chœur par le public comme si elle n’a jamais quitté le Togo.
Bimod devra rester probablement dans les annales avec son ambition de faire du Togo un carrefour régional de la mode. Il faut faire confiance à la directrice Bamondi dont les ambitions sont de « valoriser le domaine de la mode en Afrique, de faire reconnaître nos talents et aider la nouvelle génération à se faire une place dans la mode africaine ». Rendez-vous en 2010.
Tony Feda© Togocultures