Pour les plus jeunes, son nom ne dit pas grand-chose. Mais il fut à une certaine époque, l’un des meilleurs présentateurs du Journal Télévisé au Togo. Le journaliste Yao Dogan est décédé selon des informations dignes de foi hier mercredi 27 juin 2012 dans un hôpital de Bordeaux en France où il était en soins. Il souffrait d’un cancer de la prostate. Il sera incinéré le 30 juin à Bordeaux à 9h en présence de sa femme, des officiels, du Directeur de la TVT, Kouéssan Yovodévi et de ses amis. Ses cendres reposeront près de son père dans le Kloto.
En ces années-là du système de parti unique ; notre télévision nationale, la fameuse Radio Télévision de la Nouvelle Marche (RTNM) aujourd’hui la TVT était plus qu’un outil de propagande au service du régime au pouvoir. Le style sobre mais captivant, Yao Dogan était de ces rares présentateurs de JT qui non seulement accrochaient mais forçaient l’admiration de la portion congrue des téléspectateurs se bousculant devant leur petit écran pour suivre les actualités.
Un bon présentateur du JT à 20 heures. « A mon avis humble, Yao Dogan a marqué son temps par son sens aigu de la profession même s’il n’avait pas la popularité d’un Latévi Ebenezer Lawson, d’un Kouessan Yovodévi ou d’un Djagba Yempabou » a déclaré Folly Adjeoda, un employé à la retraite de la défunte OPAT à Lomé.
Bien de gens doivent encore se souvenir de ce présentateur au dicton correct, qui en cette funeste nuit du 29 juillet 1992, deux décennies déjà, mit un terme à sa présentation des nouvelles télévisées par le décès à Paris en France de Tavio Amorin, jeune leader du Parti Socialiste Panafricain (PSP) des suites de l’attentat dont il fut l’objet quelques jours auparavant dans les rues de Tokoin –Gbonvié. Un crime signé Kossi Karewé et Yodolou Boukpessi au nom des forces obscures et ennemies de la démocratie en gestation au Togo.
Enseignant avant d’entrer dans les médias
Yao Dogan fut d’abord enseignant à l’Ecole primaire publique de Tokoin –Kodomé, un quartier de Lomé, avant de faire carrière dans la presse comme bien avant lui ses devanciers, Ferdinand Sémého Quadjovie, ancien patron deTogo –Presse ; Bénoit Messan Gnamey, reporter sportif émérite à Radio Lomé ou le regretté Félix-Aurélien Boccovi, le champion de l’émission enfantine à la radio tout comme à la télévision.
Reporter sportif, Yao Dogan avait non seulement présenté le magazine sportif sur la défunte RTNM, mais commenté ensemble avec Maurice Mana Palanga et Badjibassa Babaka, de nombreuses rencontres sportives internationales du Togo. Il avait été interdit d’antenne tout comme Adrien Béliki Akouété, Younglove Amavi, Ziggar Allaga le 16 novembre 1992, jour du lancement de la grève générale illimitée lancée par le COD2 et un collectif de syndicats notamment le Syndicat des Agents de l’Information, Techniciens et Journalistes des Organes Publics (SAINTJOP), dont ils étaient affiliés.
Muté par la suite au Service du Cinéma et des Actualités Audiovisuelles (Cineato ) rebaptisé Centre National de Production Audiovisuelle ( CNPA ), par dérision un « garage » pour des journalistes de médias publics n’aimant pas se faire guider, Yao Dogan lui, le self-made –man sut gérer cet « échec professionnel » à lui imposé. On verra rebondir autrement l’ancien présentateur JT à la télévision togolaise.
Refusant de subir le coup, il transforma cette claque en expérience positive. Yao Dogan apportera sa maîtrise et ses connaissances en matière des médias en qualité de Conseiller à la rédaction de la Radio Nostalgie (Légende Fm) à Lomé. Ils sont nombreux ces journalistes et animateurs de cette station flanquée au pied de la colline qui mène au CHU de Tokoin à se rappeler de sa rigueur dans le traitement et la présentation de l’information. Yao Dogan a été également Correspondant pour le Togo de l’Institut Panos Afrique de l’Ouest (IPAO) basé à Dakar au Sénégal, mais aussi Consultant RFI sur des questions culturelles et musicales.
Lors des manifestations marquant le cinquantenaire de l’accession du Togo à la souveraineté internationale, Yao Dogan, le mélomane averti, eut le culot d’organiser en août 2010 à Lomé avec le promoteur culturel Malick Ayeva, un grand concert réussi dédié aux vieilles gloires de la chanson togolaise.
Bosseur, affichant toujours une certaine élégance, Yao Dogan selon les propres termes de l’écrivain Kangni Alem, restera un exemple de professionnalisme dans les médias. En héritage, il nous laisse le magazine L’Bala dont il était le concepteur. Compassion émue de toute la presse togolaise à la famille de l’ami et confrère, mais surtout à sa veuve, Vicky Byll, ancienne speakerine à la RTNM.
Par Ekoué Satchivi ©togoculture